Israël étudie l'option d'un raid contre l'Iran
Selon la presse israélienne, les modalités d'une attaque préventive contre les installations nucléaires iraniennes se précisent.
De notre correspondant à Jérusalem
Israël serait en train d'envisager plus sérieusement que jamais une attaque préventive contre les installations nucléaires iraniennes. Depuis plusieurs semaines déjà, des diplomates étrangers s'alarment des préparatifs israéliens. L'éditorialiste Nahum Barnea du quotidien Yedioth Ahronoth a porté le débat sur la place publique en Israël vendredi dernier, en laissant entendre que Nétanyahou et son ministre de la Défense Ehoud Barak auraient déjà pris la décision de lancer une attaque contre l'Iran.
Barak a précisé lundi qu'aucune décision n'avait été arrêtée. Sans vraiment convaincre, puisqu'il a ajouté le lendemain à la Knesset qu'il pouvait y avoir «des situations sensibles dans lesquelles Israël devra défendre ses intérêts vitaux de façon indépendante».
Mercredi, le quotidien Haaretz, citant une source officielle israélienne, confirmait que Nétanyahou et Barak s'efforçaient de convaincre une majorité au sein du cabinet, et que Liberman, le ministre des Affaires étrangères, se serait déjà rallié à cette option.
S'il reste difficile de mesurer à quel point ces rumeurs sont fondées, la possibilité d'un raid israélien contre les installations nucléaires iraniennes est loin d'être une simple spéculation.
Israël a déjà par deux fois lancé des attaques surprises contre des sites nucléaires au Moyen-Orient. En 1981, l'aviation israélienne avait détruit le réacteur irakien d'Osirak, puis, en septembre 2007, une installation nucléaire secrète en Syrie.
Rapport de l'AIEA
Dans les deux cas, les raids n'ont été précédés d'aucune escalade verbale ou diplomatique, ni par un débat public. Ces opérations ont été chaque fois décidées par le cabinet restreint. Ce cabinet de la cuisine, comme on l'appelle depuis l'époque où Golda Meir avait pris l'habitude de réunir chez elle les principaux responsables de la sécurité du pays, est la seule réelle instance décisionnaire en la matière.
L'échelon politique y est représenté par le premier ministre, le ministre de la Défense, et le ministre des Affaires étrangères. Le chef du Mossad, le chef d'état-major des armées, le directeur du renseignement militaire (Aman), et le chef des services de sécurité intérieure (Shin Beth) pèsent aussi un poids important. «Israël n'est pas un État où l'armée ou les services secrets prennent seuls leurs décisions, ou désobéissent au pouvoir politique. Mais aucun premier ministre israélien ne peut aller contre l'avis de plusieurs de ces responsables», explique un diplomate étranger.
Cette opposition s'est récemment beaucoup réduite. Les précédents chefs sécuritaires israéliens, Meir Dagan au Mossad, Gabi Ashkenazi, à l'état-major, Amos Yadlin à la tête d'Aman, le renseignement militaire, et Yuval Diskin au Shin Beth, les services de sécurité intérieure, opposés à une aventure militaire contre l'Iran, ont tous été remplacés au cours de l'année écoulée. Leurs successeurs, Tamir Pardo, Benny Gantz, Aviv Kochavi et Yoram Cohen, ont été nommés par Nétanyahou, et ne pèsent pas autant que leurs prédécesseurs.
Beaucoup d'éléments extérieurs pourraient aussi inciter les Israéliens à envisager une action directe contre l'Iran. Les sanctions internationales atteignent leurs limites. Sans que les experts s'accordent sur les délais dans lesquels l'Iran serait capable de se doter d'une arme nucléaire, la plupart reconnaissent que le programme n'a pas été interrompu. L'Agence internationale pour l'énergie atomique devrait rendre un rapport important sur le programme nucléaire iranien la semaine prochaine. De nouvelles sanctions pourraient cependant se heurter à l'opposition de la Chine et de la Russie.
Les opérations secrètes, attribuées au Mossad, ont elles aussi considérablement ralenti le programme. Au moins trois savants atomistes iraniens ont été assassinés mystérieusement au cours des deux dernières années. Un étrange virus informatique, Stuxnet, a déréglé les centrifugeuses produisant de l'uranium enrichi. De tout aussi mystérieuses explosions ont saboté des installations souterraines iraniennes en octobre 2010. Mais les actions clandestines, dont Meir Dagan avait été le grand ordonnateur sont partielles.
Benyamin Nétanyahou, qui répète depuis sa réélection en 2009 qu'un Iran nucléaire ferait peser sur Israël une menace existentielle, et Ehoud Barak, son ancien supérieur quand il servait au commando Sayeret Matkal, forment un tandem étroitement soudé. Ils ne peuvent décider seuls d'une opération contre les sites nucléaires iraniens, qui, par son ampleur, sa difficulté, et par les risques de conflagration régionale qu'elle comporte, serait sans précédent. Mais ils peuvent peser de tout leur poids en sa faveur s'ils considèrent qu'elle devient inévitable.
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